Vivre en famille recomposée peut amener son lot de défis. © Getty Images

Témoignages: “Nous n’avons pas réussi à construire une famille recomposée”

Par Tatiana Czerepaniak

Les familles recomposées sont entrées dans la norme. Mais ce nouveau modèle familial est-il gage de réussite? Pas toujours, si l’on en croit ces deux jeunes femmes pour qui le mix de ménages a été source de difficultés.

45% des familles belges sont identifiées comme étant monoparentales ou recomposées. Des chiffres qui s’expliquent par le nombre croissant de divorces et de séparations, et par le fait que les célibataires avec enfants reconstruisent bien souvent un deuxième foyer au cours de leur vie amoureuse. Résultat: les enfants et beaux-enfants s’intègrent à ces nouvelles unions.

Et si certains adultes parviennent à créer une nouvelle tribu heureuse, pour d’autres, la sauce ne prend pas. C’est le cas de Fanny et Sophie, toutes deux âgées de 34 ans et mères de deux enfants.

Spirale négative

Fanny est maman de 2 garçons de 9 et 12 ans. Séparée du père de ses fils, elle revit aujourd’hui en couple. Une vie de famille recomposée à laquelle n’a pas adhéré son cadet, qui ne supportait pas ce nouveau schéma familial. 

“La relation que j’ai entretenue avec le père de mes enfants était extrêmement compliquée, voire toxique. Un jour, après quinze ans de vie commune et deux enfants, j’ai décidé que cela avait été trop loin et qu’il était temps que je prenne soin de moi. Au début de la séparation, j’avais la garde quasi exclusive des enfants, ils allaient chez leur papa un week-end sur deux. Cela ne posait pas trop de soucis à ce moment-là”.

Les choses se corsent quand Fanny débute une histoire d’amour avec son conjoint actuel: “C’est un ancien ami de la famille, et nos ex ont assez mal pris le fait qu’on se mette en couple. Le papa de mes enfants a dit beaucoup de mal de mon compagnon, ce qui a mis nos garçons dans une position difficile, une sorte de conflit de loyauté. Mon aîné a refusé d’y prendre part, mais mon cadet, lui, a été totalement emporté par cette spirale négative”.

Un déménagement à 800 kilomètres

Malgré les difficultés, une nouvelle vie se dessine pour Fanny, qui prend la décision d’aller vivre à 800 kilomètres de la région dans laquelle elle et son ex vivaient. “C’était comme un nouveau départ pour moi, loin de mon ancienne vie et au plus près de mon nouveau bonheur. Naïvement, j’ai cru qu’il suffirait que je sois heureuse pour que mes enfants se sentent bien, mais cela n’a pas été le cas de mon cadet, qui a très mal vécu le quotidien au sein de cette famille recomposée”.

Naïvement, j’ai cru qu’il suffirait que je sois heureuse pour que mes enfants se sentent bien.

Le petit garçon n’accepte ni le déménagement ni ce nouveau day to day, et fait vivre un enfer à tout le monde: “On avait droit à des crises assez importantes, de la jalousie exacerbée envers son frère aîné, mais aussi envers la fille de mon chéri qui est plus jeune, des colères pour un oui ou pour un non… Et ces difficultés s’intensifiaient lorsque les garçons revenaient de chez leur père où ils passaient les vacances scolaires. Un jour, il a enfin verbalisé ce qui n’allait pas: il voulait vivre chez son père et pas chez moi, il ne se plaisait pas dans notre famille”.

Les besoins de son fils en priorité

Si cette vérité est difficile à entendre pour Fanny, elle tente tout de même de mettre le bonheur de son fils avant tout, ainsi que celui du reste de la famille: “Mon fils était malheureux, c’était une réalité. Mais cela causait aussi du tort à mon fils aîné, à mon conjoint et à sa fille, que nous accueillions un week-end sur deux. J’ai entendu ce que mon cadet avait à me dire, et je n’ai pu que respecter son besoin d’être avec son papa, même si cela impliquait qu’il serait loin de moi. J’avais beau lui apporter tout l’amour que j’avais, la seule chose qu’il souhaitait, c’était être avec son père”.

Fanny comprend alors que ce qui la rend heureuse ne fait pas forcément le bonheur de son enfant. “Je me suis fixé un choix de vie et je m’y tiens, mais je peux comprendre que cela ne convienne pas à mon fils, raison pour laquelle j’ai accepté son choix”.

Garder contact à tout prix

Depuis l’été 2020, le fils de Fanny vit donc avec son père, et rejoint sa maman une semaine complète pendant les vacances scolaires. Quand il revient, Fanny vacille entre la joie de retrouver son petit garçon et la peur que les choses se passent mal: “Je suis toujours impatiente de le voir et il me manque beaucoup, mais je dois avouer qu’on marche souvent sur des œufs lorsqu’il revient à la maison… J’ai toujours un peu peur qu’il ne se sente pas bien, qu’il y ait de nouveaux conflits. On sent aussi qu’il ne trouve pas vraiment sa place, même si on fait tous beaucoup d’efforts pour qu’il la trouve”. La maman fait preuve de résilience: “J’apprends chaque jour à accepter cette situation qui est la mienne. Je ne vous cache pas que c’est très difficile en tant que mère d’accepter que mon fils n’ait pas trouvé sa place dans cette nouvelle famille. Mais je me dis que son besoin actuel est de vivre exclusivement avec son papa et que je dois le respecter”.

Pour Fanny, la priorité est aujourd’hui de garder le lien: “J’appelle mon fils régulièrement, je lui envoie des colis et j’essaie d’avoir de petites attentions à son égard. Le jour de son anniversaire, je l’ai appelé en visio et lui ai fait souffler une bougie à distance… J’ai aussi un contact régulier avec son institutrice, qui m’explique comment les choses se passent à l’école. Ce n’est pas simple, mais c’est ma manière de lui dire que je suis là et que ma porte lui sera toujours ouverte”.

Sophie a tenté par deux fois de vivre avec l’homme qu’elle aime

Sophie est séparée du père de ses enfants depuis sept ans. Après de longs mois en tant que maman solo, elle a rencontré un homme dont elle est tombée follement amoureuse et avec qui elle rêvait de construire une vie de famille heureuse. Un échec.

“Quand on s’est connus, on vivait chacun avec nos enfants, surtout lui, qui avait toujours eu la garde exclusive de son fils de 12 ans à l’époque. Pendant deux ans, on a donc vécu notre histoire d’amour en vivant chacun chez soi, mais cela se passait tellement bien qu’on a eu envie de vivre ensemble”. Sophie quitte alors son logement pour aller vivre chez son amoureux. Mais très vite, elle déchante: “Mes enfants et moi avions l’impression de ne pas être vraiment chez nous et, surtout, de déranger mon homme et son fils dans leur équilibre. On était comme des éléments perturbateurs et c’était assez difficile à vivre. Le fils de mon compagnon, qui entrait dans l’adolescence, était enfant unique; il a donc eu beaucoup de mal à partager son espace, ce qui le rendait agressif avec mes enfants. Sauf que son papa lui donnait constamment raison, peu importe ce qu’il dise ou fasse”.

“On avait l’impression de les déranger constamment”

Un comportement que ne supporte pas Sophie, qui en parle à de nombreuses reprises à son compagnon, sans que ce dernier n’agisse pour autant. “Cela a créé beaucoup de tensions entre nous, les disputes ont été de plus en plus courantes. Un jour, j’en ai eu assez de faire vivre ça à mes enfants et je lui ai annoncé que je voulais déménager.”

Les amoureux continuent de se voir, surtout en cachette: “Ma famille avait moyennement apprécié le fait que je parte de chez lui, et je ne voulais pas perturber mes enfants. Alors on s’est tus pendant longtemps. Et de nouveau, cela a fonctionné super bien entre nous”. Mais le flou de la situation pose problème à la jeune femme: “Mon compagnon était réticent à l’idée qu’on vive à nouveau ensemble, vu notre précédente expérience et notre complicité retrouvée. Mais il comprenait mon impression de ne pas ‘vivre dans le vrai’, alors on a décidé de retenter l’expérience”.

Deuxième tentative, deuxième échec

Pour mettre toutes les chances de son côté, le couple part à la recherche d’un logement où repartir d’une page blanche. “Vivre chez lui avait été un échec cuisant; on s’est dit qu’en vivant dans un endroit qui n’était ni à lui ni à moi, on éviterait les problèmes de territoire que nous avions rencontrés au préalable”.

Le couple flashe sur une maison en location et les deux familles y emménagent rapidement. Un bonheur qui sera de très courte durée: “Deux ans après cette première expérience désastreuse, je me retrouvais à nouveau face à un ado qui me manquait de respect et qui manquait de respect à mes enfants. Il refusait de respecter la moindre règle, faisait littéralement ce qu’il voulait: manger tout et n’importe quoi à n’importe quelle heure, rentrer avec ses chaussures sales alors que je venais de nettoyer, n’endosser aucune tâche ménagère. En plus d’être super désagréable avec tout le monde. Franchement, c’était l’enfer!”.

Quitter l’homme qu’elle aime

Un an après cette deuxième tentative, Sophie prend la décision de quitter pour de bon l’homme qu’elle aime: “J’étais folle de lui, mais plus malheureuse que jamais… Et cela avait un impact sur mes enfants: ils n’arrivaient pas à trouver leur place et à vivre pleinement leur enfance. J’ai dû voir la vérité en face: on n’arriverait jamais à trouver le bonheur ensemble”. Sophie déménage afin de se reconstruire et de panser ses plaies: “Cette décision était extrêmement difficile à prendre, mais c’était la seule issue possible si je voulais me remettre d’aplomb et permettre à mes enfants d’avoir une vie paisible, aux côtés d’une maman sereine”.

Cela fait un an que Sophie vit seule avec ses enfants. Elle confie avoir trouvé du bonheur dans cette vie de maman solo dans laquelle elle se consacre à 100% à ses enfants.

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