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L’art d’être de (bons) parents séparés

Comment mettre toutes les chances du côté de l’enfant pour qu’il puisse surmonter au mieux l’éclatement de son cocon familial? Conseils de deux spécialistes de la question.

À FAIRE

Se séparer vraiment

Si vivre aux côtés de parents qui s’entre-déchirent est perturbant pour l’enfant, les voir continuer à se faire la guerre une fois séparés peut s’avérer destructeur. «On ne peut réellement être attentif à son enfant que si l’on est sorti du conflit», insiste le Dr Benzohra, pédiatre, psychiatre et thérapeute familial. «Les ex-conjoints qui poursuivent leurs querelles tentent inconsciemment de maintenir la relation: ils restent des partenaires de conflit, parfois toute une vie…» Se séparer pour le meilleur et non pour le pire implique aussi de respecter l’autre, comme le rappelle Diane Drory, psychanalyste: «Le respect ouvre la porte à tous les possibles, c’est une clé pour rester de bons parents.»

Des accords clairs

Avant que les problèmes ne surgissent, il est bon de discuter des choses pratiques et concrètes. «Tant de couples séparés se déchirent autour des vêtements, des valises…, constate la psychanalyste. Mieux vaut instaurer dès le début un règlement clair et s’y tenir. Cela dit, il faut parfois se montrer flexible dans l’intérêt de l’enfant. Si votre ado a besoin de passer un peu plus de temps chez son père pour le moment, pourquoi ne pas l’accepter?»

Accepter les différences

Il est vain et néfaste de chercher à éduquer d’une seule voix: «Décider de se séparer, c’est admettre que les choses se passent autrement chez l’autre parent; ce qui ne signifie pas forcément moins bien, analyse le Dr Benzohra. Sauf maltraitance, cela ne regarde plus l’ex-partenaire. Un enfant, ça s’adapte; il devrait même profiter de la situation si on le lui permet…»

Deux éducateurs

L’enfant a besoin d’un lien solide et fiable avec ses deux parents et ne peut réellement se forger son identité que dans la confrontation à chacun. «Il faudrait poursuivre l’éducation, avec limites et conséquences, même si on en a la garde que deux jours par mois, poursuit le psychiatre. Père et mère doivent continuer à faire prévaloir leurs convictions; non comme prétexte à attaquer l’autre, mais pour servir de guide à leur enfant.»

Rassurer

«L’enfant vit la séparation comme une épreuve, un traumatisme. Il doit faire le deuil de sa famille, se trouver de nouveaux repères et composer avec le sentiment presque incontournable d’avoir une part de responsabilité dans la rupture du couple parental», analyse Diane Drory. Il est bon de lui rappeler qu’il n’a aucun rôle à jouer dans l’histoire des adultes et de le rassurer quant au fait que faire le deuil du couple parental ne signifie en aucun cas perdre l’affection des parents.

Tenir compte des besoins de l’enfant

«Il n’est pas simple d’être entièrement disponible à son enfant quand on est soi-même troublé», poursuit la psychanalyste. Or, le manque d’attention blesse l’enfant qui a plus que jamais besoin d’être soutenu. «Le dialogue est essentiel, ajoute le docteur Benzohra. Arrêtons-nous pour écouter ses questions et y répondre, mais aussi pour décoder ses silences. Notre enfant, on le connaît; on sait quand il est torturé.» Reconnaître sa souffrance est un premier pas énorme pour l’aider à la dépasser et à se reconstruire.

Sans équivoque

L’enfant espère toujours que ses parents se remettent ensemble. Il appartient aux adultes de lui faciliter l’acceptation de la rupture par des mots simples et des attitudes sans équivoque, comme le rappelle Diane Drory: «Evitons de plonger l’enfant dans la confusion: les week-ends ou vacances ensemble, c’est pour les couples, pas pour les ex-conjoints. En revanche, rien ne les empêche de se réunir pour marquer, en tant que parents, les événements qui ont trait à leur enfant (anniversaire, communion…».

À ÉVITER

L’enfant otage du conflit parental

Les experts insistent: plus ses parents le tiendront à l’écart de leurs griefs mutuels, discussions financières et autres règlements de compte, mieux l’enfant se portera. Il est capital qu’il lui soit donné le droit d’aimer librement ses deux parents, sans craindre de les trahir ou les faire souffrir. «Prendre l’enfant en otage est l’une des sources de souffrance les plus fréquentes chez les enfants de parents séparés, relève Diane Drory. Ça le plonge dans un conflit de loyauté insoutenable, qui se résume à: ‘Si j’aime Maman, je rejette Papa. Et inversement…’. Souvent, l’enfant prend alors parti pour le parent le plus fragile, qui est en fait celui qui dénigre l’autre. Or, ce n’est pas toujours celui qui s’occupe de lui de la façon la plus adéquate… A l’excès, on tombe dans l’aliénation parentale: l’enfant efface tous les souvenirs agréables liés au parent critiqué et finit par ne plus vouloir le voir.» Il s’agit pour lui d’une véritable destruction psychologique.

L’enfant messager ou confident

«Il est très pénible d’être le messager ou le confident de ses parents. Epargnons-lui les communications du style: ‘Tu demanderas à ton père de me verser la pension alimentaire’ ou ‘Depuis que ta mère est partie, je n’arrive pas à l’oublier dans les bras d’une autre’», souligne le psychiatre. L’enfant a sa vie à vivre, c’est l’en empêcher que de lui confier une place et des responsabilités qui ne sont pas les siennes. Il revient au parent de l’aider à gérer ses émotions, pas le contraire.

Texte: Marie Bryon

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