Il existe des applications de rencontres dédiées à l'amitié. © Rdne Stock Project/Pexels

Psycho

Comment se faire de nouvelles amies?

Par Christelle Gilquin

28 janvier 2024

Votre réseau amical a fondu comme neige au soleil ces dernières années? Or, vous rêvez à nouveau de confidences, d’éclats de rire et de sorties entre copines? Il n’est jamais trop tard.

Faites-vous partie des bénies qui se font de nouvelles copines dès qu’elles mettent un pied dehors? Ou de celles qui cultivent le même réseau depuis l’université? Ou encore de celles qui, après un divorce, un licenciement, un déménagement, ou parce qu’elles ont un quotidien bien chargé, ont peu à peu perdu leurs amitiés? Se faire de nouvelles amies à l’âge adulte est difficile. Plus difficile en tout cas que dans la cour de récré lorsqu’on liait des liens avec un simple “Tu veux bien être mon amie?”.

“Quand on est enfant, tout est possible, analyse Audrey Van Ouytsel, sociologue et coach. Mais à l’âge adulte, on est moins influençable, moins ouverte d’esprit. On a un parcours de vie, on a connu des épreuves, des pertes, on est plus méfiante et exigeante: on préfère se replier sur les gens qu’on connaît plutôt que de risquer de nouvelles rencontres et être déçue. Et puis, on manque de temps aussi. Entre un job, une famille, une maison à gérer… Où trouver l’énergie nécessaire pour développer de nouvelles affinités?” Selon une étude américaine, créer un lien intime avec quelqu’un demanderait en effet plus de 200 heures!

L’amitié, la clé de notre bonne santé?

Pourtant, l’amitié est bénéfique pour tout le monde. Une enquête longue de 80 ans de l’Université d’Harvard voit même dans des relations sociales de qualité le seul et unique gage de bonne santé, mentale et physique – le manque de soutien social ayant le même effet délétère que le tabagisme, l’obésité ou l’absence d’activité physique.

Plus on est obsédée par l’idée de se faire des amies, moins on y arrive

“En réalité, vos amis sont beaucoup plus importants que vous le pensez pour votre santé et votre bien-être, écrivent les deux responsables de l’enquête dans leur livre The Good Life. Vos proches vous remontent le moral quand vous êtes déprimé, ils vous relient à votre propre histoire et, surtout, ils vous font rire; or, parfois, rien n’est meilleur pour la santé qu’un bon moment entre amis. Ces liens diminuent aussi notre perception de l’adversité: les épreuves nous apparaissent moins stressantes que si nous étions seuls. Et même lorsque nous subissons un stress extrême, ils peuvent en réduire l’impact et la durée. Nous ressentons toujours le stress, mais avec leur aide, nous sommes mieux à même de le gérer. Un stress moins intense et mieux géré entraîne une moindre usure de notre corps”.

Où faire des rencontres

Nous avons demandé aux 19.000 membres du groupe Facebook The Wellnest, le groupe de copines bienveillant comment elles avaient rencontré leurs plus récentes amies. Voici quelques-unes de leurs réponses.

“En arrivant à Bruxelles avec mon copain, nous avons décidé d’organiser des ateliers gratuits chez nous. Nous avons relayé l’info sur des groupes FB dont on partageait les valeurs. Nous avons ouvert notre porte à de parfaits inconnus et proposé des ateliers (créatifs, jeux, développement personnel…) et des dîners en mode auberge espagnole. Nous avons aussi proposé à d’autres personnes d’organiser des ateliers dans notre salon. Une chouette communauté s’est créée et c’est comme ça que nous nous sommes fait tous nos amis proches”. (Joy)
“Je me suis fait des copines via des clubs de sport collectif (foot féminin et ultimate frisbee). Plein de moments forts et de fêtes partagés!” (Noémie)
“Mes plus récentes meilleures amies, je les ai rencontrées lors des concerts de notre artiste préféré”. (Caro)
“Ici, on tisse des liens avec les parents des enfants qui sont à l’école avec les nôtres”. (Élise)
“Mes dernières amies, je les ai rencontrées en participant à des retraites bien-être. Vu ce que l’on partage, ça devient vite de super amies”. (Sophie)
“J’ai rencontré certains de mes amis à des cours du soir: langue, cuisine, œnologie… Ce sont des activités qui nécessitent de parler aux autres. Bien sûr, si on veut passer du stade de ‘on se voit juste au cours’ au stade de l’amitié, il faut aussi oser parler un peu plus, poser des questions, proposer d’aller boire un verre…” (Catherine)
“Je me suis fait un sacré groupe de copines dans mon dernier espace de coworking. On est toutes freelances, ça crée des liens”. (Jennifer)
“Quasi toutes mes copines actuelles sont des personnes que j’ai rencontrées via le crossfit. J’en fais depuis plusieurs années et ce, dans plusieurs salles”. (Mathilde)
“J’ai un chien et un enfant, je connais donc absolument tout le quartier!” (Guen)
“Mes amies viennent quasi toutes d’Internet. Que ce soit Facebook, Insta, de groupes FB…” (Margot)

En réalité, on peut faire des rencontres n’importe où. Privilégiez les endroits où vous croisez les mêmes personnes régulièrement (boulot, sortie de l’école, activités sportives, cours du soir…), ou les endroits où les gens ne sont pas pressés (salle d’attente, file, avion, marches adeps…). Pensez aussi aux amis d’amis, une solution qui marche aussi bien en amour qu’en amitié.

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Un bon vivier? Vos connaissances! Celles que vous croisez régulièrement au cours de Zumba, qui s’installent dans le même compartiment que vous dans le train, qui attendent leur enfant à la sortie du même club de judo que le vôtre… Se connaître de vue instaure d’emblée une forme de confiance. Ne reste plus qu’à entamer la conversation.
Sortez en groupe. “Une personne dans un groupe, explique Audrey Van Ouytsel, inspire la confiance, instinct grégaire oblige. Profitez de cet effet positif (il n’est pas nécessaire de partager une grande intimité pour sortir en groupe!)”
Ou au contraire, privilégiez les expériences seules, conseille Caroline Arditi, autrice du livre Nous. “Acceptez les invitations où vous ne connaissez personne ou presque vous serez peut-être très agréablement surprise de voir où ça vous mène. Ne vous posez pas trop de questions, lancez-vous!” Être seule oblige en effet à être plus ouverte à ceux qui nous entourent et offre davantage aux autres l’opportunité de venir à notre rencontre.
Acceptez les sorties. Parce que chacune est l’occasion de faire de nouvelles rencontres, d’en approfondir certaines, ou simplement de pratiquer vos compétences sociales.
Provoquez les rencontres. “Multiplier les rencontres, explique Caroline Arditi, c’est aussi et d’abord en être le premier instigateur. Plus vous êtes acteur, plus les opportunités de rencontres se multiplient. (…) Quand vous êtes dans l’énergie d’ouverture et dans cette posture de réceptivité, les autres viennent aussi naturellement frapper à votre porte”. N’hésitez pas à adresser la parole à votre voisine de table au resto ou à la personne qui vous précède dans la file d’attente (en plus, le temps passera plus vite). Ni à lancer des propositions de sortie aux gens que vous côtoyez régulièrement sans être proches pour autant.
Intéressez-vous aux autres! “Vous vous ferez plus d’amis en deux mois en vous intéressant sincèrement aux autres que vous ne pourriez en conquérir en deux ans en vous efforçant d’amener les autres à s’intéresser à vous”, disait déjà il y a un siècle Dale Carnegie dans son livre référence Comment se faire des amis.
Souriez. “Il paraîtrait que le sourire peut provoquer, par réaction en chaîne, jusqu’à 500 sourires dans une journée, affirme Caroline Arditi. Avouez que ce serait difficile de froncer les sourcils quand quelqu’un nous sourit! Sourire, c’est surtout laisser votre lumière intérieure resplendir, la plus subtile des expressions humaines qui connecte les gens entre eux. Une manière spontanée de faire naître des échanges de qualité et d’installer aussi la confiance en l’autre”.
Osez vous montrer vulnérable. C’est là que naissent généralement les plus belles rencontres: lorsqu’on ose se montrer telle qu’on est à l’autre, et réciproquement. “La vulnérabilité rend les gens beaux, humains et vivants à la fois, estime Caroline Arditi. Comme pour le sourire, plus vous vous montrez vulnérable, plus vous encouragez l’autre à le faire à son tour, et les moments partagés prennent alors une autre dimension”.
Ne (vous) mettez pas la pression. “Plus on est obsédée par l’idée de se faire des amies, moins on y arrive!, affirme Audrey Van Ouytsel. Restez dans la légèreté, l’insouciance, laissez le rapprochement se faire en douceur. Vous avez fait une chouette rencontre, peut-être allez-vous vous revoir. Ou pas. En tout cas, ne vous accrochez pas à tout prix: personne n’aime se sentir emprisonné”.
Soyez patiente: “L’amitié prend du temps, constate Audrey Van Ouytsel, surtout si on vise un certain degré d’intimité. Il arrive que l’on partage un vécu émotionnel fort, ce qui peut accélérer les choses, sinon cela peut prendre des années!”

Et après, comment entamer la conversation?

Première étape: inutile de citer Nietzsche dans le texte. Tout ce qu’on vous demande pour commencer, c’est de créer un climat de sympathie en faisant la conversation. Peu importe que cela soit avec des banalités. Utilisez ce que vous avez sous la main: “Fait pas chaud aujourd’hui” (ah, la météo, sujet universel s’il en est), “Trop mignon, ce bébé/chien. Quel âge a-t-il?”, “Y’a du monde aujourd’hui!” Cela devrait suffire à créer le contact.

La cuisine, ça rassemble et c’est feel good

Deuxième étape: abordez les sujets qui intéressent tout le monde (sans pour autant créer la polémique, comme la politique ou la religion): le travail, la famille, les loisirs… Caroline Arditi ajoute les voyages, les lectures et la nourriture. “La cuisine, ça rassemble et c’est feel good, dit-elle. C’est fou comme vous pouvez être surpris de constater là où ça peut vous mener, et généralement vous allez en apprendre beaucoup plus que ce que vous croyez”.

Troisième étape: si vous voulez approfondir la relation, il va falloir laisser tomber les discussions superficielles et aborder des sujets plus intimes. Parlez de vous, de vos expériences personnelles, de vos doutes, de vos peurs, de vos fiertés… Faites-le sans accaparer la discussion, laissez de la place à l’autre et intéressez-vous à ce qu’il dit, mais la réciprocité et la vulnérabilité sont essentielles dans la construction d’une belle amitié.

Le monde virtuel peut vous aider

Vous avez du mal à engager la conversation? Le monde virtuel regorge lui aussi de possibilités de rencontres et d’amitié.

Facebook et ses nombreux groupes

De plus en plus de groupes de femmes se créent sur FB, permettant de poser, à un vaste réseau de femmes, les questions qui vous turlupinent, voire de proposer des sorties. C’est le cas de The Wellnest-le groupe de copines qui met en relation 19.000 femmes de Bruxelles et Wallonie et organise des activités à leur attention. Ou des SuperWomen du Brabant Wallon (15.000 membres) et de son équivalent en province du Luxembourg, ou encore de Brussels Ladies Meetup Network (6000 membres, en anglais). Vous pouvez aussi rejoindre des groupes consacrés aux sujets qui vous préoccupent (Hypersensible, Parent épuisé, Homoparentalité asbl, Fans de Clem…)

Les applis de rencontres amicales

Certaines applications se sont également spécialisées dans les découvertes amicales: Bumble, un site de rencontres avec un volet “amis”; Unblnd, ce petit nouveau qui vous permet de rejoindre des groupes de discussion en fonction de vos goûts; Boo, sorte de Tinder de l’amitié (après avoir répondu à un quizz de personnalité) ou encore MeetUp et Knockk, qui proposent des sorties en fonction de vos intérêts (principalement sur Bruxelles).

Pour aller plus loin: Nous. L’art de bien s’entourer pour rayonner ensemble, Caroline Arditi, Éd. Solar et The Good Life. Ce que nous apprend la plus longue étude scientifique sur le bonheur et la santé, Robert Waldinger et Marc Schultz, Éd. Leduc.