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Comment vivre avec l’hémophilie lorsqu’on est une femme?

Par Tatiana Czerepaniak

L’hémophilie se caractérise par un déficit de la coagulation pouvant aller jusqu’à provoquer des hémorragies. Et si cette maladie a longtemps été vue comme un trouble typiquement masculin, on sait aujourd’hui que les femmes peuvent, elles aussi, en souffrir.

Selon les chiffres de la fondation mondiale de l’hémophilie, plus de 337.000 personnes souffrent, dans le monde, d’un trouble de la coagulation. Parmi elles, 210.000 sont identifiées comme étant hémophiles, une maladie génétique récessive liée au chromosome X, qui provoque une défaillance – voire une absence – de facteurs de coagulation. Ce qui implique donc une difficulté – voire une incapacité – à former un caillot de sang afin de stopper les saignements. En bref, quand une personne hémophile se blesse, le saignement ne sera pas plus important, mais durera par contre plus longtemps, vu la particularité génétique. Dans les cas les plus graves, les personnes hémophiles peuvent même souffrir de saignements spontanés à différents endroits du corps, très souvent au niveau des muscles et des articulations.

L’hémophilie, une maladie typiquement masculine?

Pendant très longtemps, les médecins ont cru que seules les personnes de sexe masculin pouvaient être atteintes d’hémophilie. Les femmes étaient alors catégorisées comme “porteuses” de cette anomalie, présentant des risques de la transmettre potentiellement à leurs bébés, mais sans pour autant déclarer de symptômes. Or, depuis plusieurs années, on remarque que les femmes peuvent elles aussi souffrir d’hémophilie mineure. Une réalité que souhaite mettre en lumière Aurélie Finders-Binje, la représentante des jeunes et des femmes au sein de l’association des hémophiles de Belgique.

Portrait de l’hémophilie au féminin

Fille d’hémophile et hémophile elle-même, Aurélie Finders-Binje est très active au sein de l’association. Elle définit pour nous ce qu’est l’hémophilie au féminin: “Pendant de très nombreuses années, on a cru que seuls les garçons souffraient de ce trouble de la coagulation. Cela s’explique surtout par le fait que les femmes présentent principalement la forme mineure de la maladie, alors que les hommes peuvent aussi souffrir d’hémophilie modérée ou majeure, dont les symptômes sont bien plus visibles”.

Selon la représentante, c’est lors des premières menstruations que les symptômes visibles apparaissent chez une fille. “C’est à l’adolescence que les signes sont les plus clairs, car la jeune fille va souffrir de règles très abondantes. Le problème, c’est que comme c’est une maladie génétique, les femmes de la famille auront tendance à la rassurer si elle s’inquiète, en lui disant qu’elles ont, elles aussi, des règles très abondantes. Or, on sait aujourd’hui que c’est un symptôme important de l’hémophilie au féminin”. Les signes principaux de l’hémophilie au féminin sont donc:

  • Des bleus, qui se forment très facilement.
  • Des règles très abondantes, parfois difficiles à contrôler et impliquant de nombreuses fuites ainsi que des difficultés à trouver des protections hygiéniques adaptées, vu le flux extrêmement abondant.
  • Des saignements, souvent difficiles à stopper.

Vivre avec l’hémophilie au féminin

Si l’hémophilie mineure n’est pas mortelle, elle peut être assez handicapante pour la femme ou la jeune fille souffrant de menstrues si abondantes: “je me souviens que lorsque j’étais ado, c’était assez difficile à gérer: je n’osais pas aller dormir chez une copine quand j’étais réglée de peur d’avoir des fuites, j’avais constamment la crainte que ma protection ne tienne pas le coup alors que j’étais en cours… C’était assez angoissant”, nous confie Aurélie.

Mais au-delà de l’inconfort généré pendant les règles abondantes, souffrir d’hémophilie peut être dangereux pour la santé: “Le problème quand on ignore être hémophile, c’est si on doit se faire opérer ou si on est victime d’un accident: l’équipe médicale, non informée du déficit de coagulation, risque d’être pris de court pendant l’acte médical. De plus, cela impliquera un suivi post-opératoire compliqué”.

Se faire diagnostiquer pour minimiser l’impact

Aurélie Finders-Binje conseille à toutes les femmes concernées par ces symptômes d’aller se faire diagnostiquer chez un hématologue. “Il est possible de minimiser les risques et, surtout, l’impact de cette maladie génétique sur notre quotidien de femme. Mais pour cela, la première chose à faire est d’aller consulter un spécialiste qui fera des examens afin de savoir si oui ou non on souffre d’hémophilie”. La représentante propose aussi de tenir un carnet de bord des menstruations: on y indique la fréquence de change des protections, si on a eu des fuites mais aussi, si c’est possible, une estimation de la quantité de sang perdu pendant la période de règles. “Ces indications seront très utiles au spécialiste”.

Une fois le diagnostic posé, les médecins pourront mettre des choses en place pour contrer les effets de l’hémophilie. “Il existe par exemple des contraceptifs qui diminuent le flux des règles, ou qui les stoppent complètement. Il est aussi possible de prendre un traitement coagulant avant que les menstrues ne surviennent”, nous explique la porte-parole.

D’autres choses à faire une fois le diagnostic posé

  • Ne pas ramasser du verre cassé ou autre objet coupant: afin de minimiser les risques de coupure. On évite également de s’épiler au rasoir par exemple.
  • Stipuler qu’on est hémophile: si on doit subir une intervention chirurgicale, lorsqu’on va chez le dentiste ou faire une prise de sang. Il est aussi possible de prendre des traitements coagulants en prévention.
  • Choisir un sport doux: il est préférable d’éviter les sports où les coups et les coupures sont possibles, tels que le paintball, les sports de combat… Si vous souhaitez malgré tout en faire, prévenez votre professeur et/ou adversaire et mettez toutes les protections nécessaires.
  • Mettre des protections: un casque lorsqu’on va faire du vélo, des gants quand on jardine, un pantalon si on va se promener en forêt… Autant de choses qui minimiseront les risques de coupures et de blessures.
  • Avoir sa carte d’hémophile sur soi: l’association de l’hémophilie peut fournir aux patients hémophiles une carte électronique à l’intérieur de laquelle est stipulé le diagnostic ainsi que les infos qui y sont relatives, telles que le traitement, la prise en charge et les numéros de téléphone des personnes de référence, en cas d’accident.

Une grossesse et un accouchement sous haute surveillance

Être porteuse du gène de l’hémophilie implique une prise en charge particulière pendant la grossesse et l’accouchement, surtout si la future maman a déclaré la maladie. ” L’accouchement et le post-opératoire seront davantage surveillés. Il est vivement recommandé d’être suivie par son hématologue pendant cette période clé de la vie d’une femme, afin qu’il puisse travailler de concert avec le gynécologue et préparer les équipes pour le jour de l’accouchement”, nous confie Aurélie, qui nous précise aussi que les facteurs de coagulation se règlent d’eux-mêmes pendant la grossesse grâce aux hormones, l’amenant à un taux relativement normal pendant la grossesse uniquement.

Si l’accouchement est mis sous haute surveillance, c’est aussi pour le bien-être du bébé, en particulier si c’est un garçon. “Lorsqu’on est porteuse du gène de l’hémophilie, on a 50% de risques de transmettre la maladie à son bébé. C’est pourquoi un accouchement dit ‘non traumatique’ est nécessaire: pas de ventouse, pas de forceps… Et au moindre souci, la césarienne est privilégiée. Surtout si la future maman attend un garçon, puisque le risque qu’il déclare une forme modérée ou sévère de la maladie est plus important”, nous explique la porte-parole des femmes et des jeunes. “C’est d’ailleurs la raison pour laquelle certains couples porteurs d’hémophilie décident de faire un enfant via ‘Fécondation In Vitro’: cela permet d’évincer les embryons porteurs du gène, en particulier si les hommes souffrent de la forme sévère dans la famille”.

Aurélie nous rassure tout de même: des traitements existent, et ils permettent de contrôler la maladie. “Des traitements assez simples à suivre peuvent aider les malades à vérifier si leur taux de coagulation augmente. On a aussi appris il y a peu qu’une thérapie génique venait d’être testée, et qu’elle pourrait permettre une guérison. On fait donc de gros progrès!”

La mission de l’association

L’association des hémophiles de Belgique – appelée aussi AHVH – a pour objectif d’informer mais aussi d’aider les Belges souffrant d’hémophilie. Voici ses différentes missions:

  • Aider les parents d’enfants hémophiles en répondant à leurs questions et en leur apprenant les bons gestes et les recommandations. 
  • Informer les enseignants et autres personnes prenant en charge un enfant hémophile.
  • Aider les patients à trouver des centres de traitement de l’hémophilie en Belgique.
  • Organiser des événements (colloques, rassemblements, voyage, etc) à destination des hémophiles – adultes comme enfants – afin de les informer et leur apprendre les bons gestes: les soins à apporter, les traitements à suivre, les sports conseillés, etc.
  • Créer du lien entre les hémophiles

Plus en savoir plus sur l’association, rendez-vous sur leur site Internet.

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