De nombreux Belges semblent penser que l’accès à l’avortement pose problème aux États-Unis, en Pologne ou au Salvador, mais pas chez nous. Or, ce n’est pas le cas. © Freepik

Avortement: 5 infos clés qui révèlent l’opinion des Belges

Par Christelle Gilquin

Ce 28 septembre, c’est la Journée mondiale pour le droit à l’avortement. À cette occasion, la section belge francophone d’Amnesty International révèle les résultats d’une enquête qui concerne les Belges et l’avortement. Voici les 5 infos à retenir.

Il y a un an, le gouvernement décidait de suspendre le projet de réforme de la loi sur l’avortement. Malgré un consensus d’experts autour de 3 points essentiels (allonger le délai légal d’interruption de grossesse de 12 à 18 semaines, supprimer le délai obligatoire de réflexion de 6 jours et faire disparaître les sanctions pénales pour les patientes qui avorteraient hors du cadre légal), aucune avancée n’a vu le jour.

Après avoir dénoncé cette inaction, la section belge francophone d’Amnesty International lance une campagne de sensibilisation via une enquête exclusive. Ses objectifs? Mieux comprendre les perceptions, les préoccupations et les attentes des personnes vivant en Belgique et mieux saisir la prévalence de ce soin de santé au sein de la population. “En apportant une vision objective de l’état de l’opinion de la société, explique Julie Capoulade, chargée de campagne chez Amnesty, nous espérons convaincre les politiques de prendre les mesures nécessaires au changement.” Voici 5 infos cruciales de cette enquête.

1. 92,5% des Belges soutiennent l’avortement

C’est la bonne nouvelle de cette enquête: le soutien à l’avortement est massif en Belgique. 81,6% pensent que “l’accès à l’avortement devrait être identique et abordable pour toutes les personnes, quel que soit leur statut en Belgique” et 86% considèrent que l’avortement devrait toujours être le choix de la personne qui avorte. Près de la moitié des sondés (47%) sont même d’avis qu’il faudrait allonger le délai légal pour permettre l’accès à l’avortement plus tard pendant la grossesse, un chiffre qu’Amnesty juge très encourageant, notamment en raison du manque de connaissance du cadre légal.

2. 11% des Belges ont déjà avorté

Et 39% des personnes interrogées déclarent connaître quelqu’un qui a déjà eu recours à un avortement. “L’avortement est en réalité beaucoup plus répandu qu’on ne le croit, éclaire Julie Capoulade: c’est un soin de santé courant.” On dispose également de quelques données intéressantes sur les personnes concernées: près de 38% d’entre elle ont des revenus qui ne suffisent pas (ou tout juste) pour boucler le mois, 16,1% se disent croyantes et 14,7% ont déjà des enfants, et choisissent de ne pas en avoir davantage.

L’âge moyen de l’avortement est de 29 ans.

“L’une des idées reçues à propos de l’IVG, note Julie Capoulade, c’est qu’elle concerne des personnes jeunes, sans enfant, qui auraient été négligentes avec leur contraception. Ce n’est pas forcément le cas. Selon les chiffres officiels de la commission d’évaluation de la loi, l’âge moyen de l’avortement est de 29 ans.”

3. Une personne sur 10 ayant avorté l’a fait illégalement

Pour rappel, l’IVG est légale en Belgique, mais elle reste strictement encadrée. Des sanctions pénales sont encore prévues si elle est pratiquée au-delà du délai légal de 12 semaines après la conception (sauf danger grave pour la santé de la femme ou anomalie incurable du fœtus); si le délai de réflexion obligatoire de 6 jours n’est pas respecté; si elle est réalisée par une personne qui n’est pas médecin ou en dehors d’un établissement agréé; si elle est pratiquée sans la demande expresse de la femme enceinte; et si les soignants ne l’ont pas informée sur les différentes options de prise en charge de l’enfant.

10,7% des personnes qui ont avorté l’ont fait en enfreignant l’une de ces obligations. L’une des solutions pour contourner ce cadre est de se rendre à l’étranger, notamment aux Pays-Bas où le délai d’intervention est de 24 semaines. On estime que cela concerne près de 500 personnes par an. “Aller avorter à l’étranger représente un coût élevé, constate Julie Capoulade – on parle de 1200€. Celles qui ne peuvent se le permettre n’ont d’autre choix que de recourir à un avortement illégal et potentiellement dangereux, ou de poursuivre une grossesse non désirée.”

Amnesty alerte sur cette situation: “Il est très inquiétant de constater que tant de personnes ont été/sont contraintes de se placer dans l’illégalité ou de sortir des frontières belges pour avorter. Interdire l’avortement ne l’empêchera jamais: les personnes concernées chercheront toujours des manières de mettre fin à leur grossesse si elles en ont besoin. Il est donc fondamental qu’elles puissent le faire de manière sûre, légale, et sans entraves dans le pays où elles vivent.”

4. Accès à l’avortement: 5 principaux obstacles

Il existe plusieurs obstacles à l’accès à l’avortement:

  • le principal est la pression sociale (45%),
  • suivent ensuite les raisons culturelles ou religieuses (38,6%),
  • l’opposition du ou de la partenaire (26,7%),
  • les délais d’attente trop longs (23%), liés à une pénurie de médecins pratiquant l’avortement,
  • et enfin le délai légal de 12 semaines, jugé trop court (22%).

5. Les Belges connaissent mal la loi sur l’avortement

Quand on interroge les Belges sur le cadre juridique de l’IVG, 2 sur 3 se disent sûrs de leurs connaissances. En réalité, seuls 6% ont eu tout bon aux questions concernant le délai légal pour avorter (12 semaines) et l’existence du délai de réflexion (6 jours). Quant au score moyen, il n’est que de 3,8/10! Les Belges semblent penser que l’avortement est plus accessible qu’il ne l’est en réalité: près de 50% affirment que l’avortement n’est plus sanctionné pénalement, et 42% croient que l’avortement est un soin de santé comme un autre.

De nombreux Belges semblent penser que l’accès à l’avortement pose problème ailleurs, mais pas chez nous. Or, ce n’est pas le cas.

“Je pense, souligne Julie Capoulade, que de nombreux Belges se disent que l’accès à l’avortement pose problème aux États-Unis, en Pologne ou au Salvador, mais pas chez nous. Or, ce n’est pas le cas.” L’ONG conclut: “Il est du devoir des autorités d’informer correctement la population sur ce cadre légal. Ce manque d’information entraîne la circulation de fausses idées, ce qui empêche les personnes de faire des choix éclairés concernant leur vie et leur santé.”

Aller plus loin

L’enquête a été réalisée en ligne du 2/6 au 16/6/2025 par iVOX, est représentative en termes de sexe, d’âge, de langue et de niveau d’éducation, et porte sur un échantillon de 2000 personnes vivant en Belgique.

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