
Ce que votre prénom dit de vous: l’avis du psychologue Joseph Agostini
Un prénom, c’est la première étiquette qu’on nous colle, sans nous demander notre avis. Il révèle pourtant une foule d’informations sur notre histoire. Un psy lève le voile sur les ressorts qui guident le choix des parents.
Psychologue clinicien, psychanalyste, auteur prolifique et homme de médias – il intervient notamment dans Parlons-nous sur RTL – Joseph Agostini publie Et ils m’ont appelé Kevin. Il y explore la part inconsciente qui se cache derrière le choix d’un prénom et dévoile tout ce que celui-ci peut révéler de notre histoire.
Un choix conscient des parents
“Ce n’est pas nous qui nous appelons tout seuls, note Joseph Agostini. Ce sont les autres qui, au tout début, ont choisi un prénom pour nous. Sans nous consulter, sans même nous avoir vus, ils se sont permis de nous le coller sur le front. Or, il y a toujours une raison inconsciente qui se cache derrière nos faits et gestes, encore plus quand il s’agit de ‘donner’ un prénom à son enfant. Personne ne fait vraiment l’économie de son passé, de ses attachements, de ses entichements, de ses secrètes lubies. C’est ce que je cherche à monter dans mon livre: quelles sont les clés de compréhension inconscientes du choix d’un prénom par les parents?”
Dorothée a 49 ans
Comme le rappelle l’expert, un prénom est “souvent la première information que les autres reçoivent à votre sujet”. On peut souvent en déduire des infos sur votre classe sociale (certains prénoms n’existent pas dans certaines classes), votre âge (les Dorothée ont 49 ans en moyenne), votre origine géographique… Un sociologue a d’ailleurs réussi à associer, pour chaque prénom, le taux d’obtention d’une mention “Très bien” au bac, et des économistes américains affirment que le nombre de syllabes et l’orthographe peuvent prédire le statut social, le niveau d’études et le salaire de la personne.
Le conseil du spécialiste? Éviter les prénoms trop à la mode, car le risque est grand qu’ils ne soient rapidement plus dans l’air du temps. Et surtout de bien réfléchir aux raisons pour lesquelles ils choisissent tel ou tel prénom. Ce qui est dangereux dans la vie, c’est de faire ou de dire des choses sans les avoir suffisamment pensées. Or, un prénom, c’est gravé dans du granit. L’enfant va le porter toute sa vie, il faut le prendre en compte avant tout.
Attention aux prénoms originaux
C’est souvent le lot des enfants de stars, ainsi que des rejetons de quelques parents originaux, qui ont tenté (sans succès) Clitorine et Vagina (pour des jumelles), Nutella ou Violence. Des choix qui laissent Joseph Agostini circonspect: “C’est vrai que le prénom de son enfant, c’est l’occasion idéale pour faire rire, épater la galerie, parce qu’il ‘sonne bien’, qu’il ‘claque’, qu’il est ‘chantant’ ou même ‘drôle’. Mais n’y a-t-il pas quelque chose de narcissique là-dedans? Certes, le prénom leur plaît, mais plaira-t-il à leur enfant plus tard? Quid s’il a envie de passer inaperçu?”
C’est l’occasion idéale pour faire rire, épater la galerie, parce que le prénom ‘sonne bien’, qu’il ‘claque’…
Un prénom unique peut permettre de se démarquer, et renforcer la confiance en soi et l’individualité, mais en raison de sa difficulté à prononcer, il peut aussi avoir un impact sur les relations sociales. Une étude d’Harvard avait montré que les personnes porteuses de noms rares ou inhabituels avaient plus fréquemment abandonné leurs études ou manifesté des symptômes de névrose par rapport à celles ayant un prénom plus courant.
Nettoyer le prénom?
Un grand classique aussi: choisir un prénom pour rendre hommage à une arrière-grand-mère danseuse de claquettes ou une cousine entourée d’un aura de mystère.
Joseph Agostini: “D’accord si le prénom a été ‘nettoyé’, c’est-à-dire si on peut expliquer plus tard à son enfant pourquoi on a choisi de rendre hommage à cet ancêtre en particulier. Exemple: ‘Tu t’appelles comme mon arrière-grand-père parce qu’il était résistant et que c’est un exemple pour la famille’. Mais attention à ces prénoms porteurs de secrets de famille ou de drame. Comme cet enfant qui porte le prénom d’un oncle décédé prématurément. Non seulement ce prénom n’est pas le sien, mais en plus, à chaque fois qu’il sera prononcé, sera évoqué le fantôme de l’oncle en question.”
C’est le cas de Salvador Dali, prénommé ainsi en hommage à son frère, mort 9 mois avant sa naissance d’une gastro-entérite. Il dit dans une interview: “Je portais dans mon corps et dans mon âme le cadavre agrippé de ce frère.” Selon les spécialistes, c’est l’ombre de la mort de son frère qui l’incita à représenter la fragilité, la mort et la résurrection, tout au long de son oeuvre.
Kevin est-il démodé?
Début des années 90, c’est le triomphe au cinéma du film Danse avec les loups, avec Kevin Costner, et de Maman, j’ai raté l’avion dont le héros s’appelait Kevin McCallister. Il n’en faut pas plus pour voir déferler une vague de petits “Kevin”. 1991 fut même appelée l’année des Kevin. Hélas, 30 ans plus tard, le prénom n’est plus du tout dans l’air du temps – c’est un euphémisme. La faute à un grand principe: une utilisation trop fréquente entraîne, à court ou moyen terme, leur déclin inévitable. Sauf que ce n’est plus tellement le cas aujourd’hui, analyse Joseph Agostini, “car on observe une plus grande variété dans les prénoms. De plus, aucune série ou blockbuster ne suscite autant de passion qu’à l’époque.”
Conclusion: penser à l’enfant d’abord
“Dans le choix du prénom peut apparaître un idéal trop grand, un désir d’immortalité si massif qu’il rend la vie plus difficile, constate enfin Joseph Agostini. Les parents pensent-ils davantage à eux ou à l’enfant au moment de le prénommer? Cette question reste extrêmement intime, mais chacun doit avoir en tête la nécessité de considérer l’enfant comme une personne et non comme un portemanteau à fantasmes.”
Vous aimerez aussi:
Recettes, mode, déco, sexo, astro: suivez nos actus sur Facebook et Instagram. En exclu: nos derniers articles via mail.