Témoignage: “Je suis devenue paralysée en quelques heures”

Par un beau matin, alors que Rita s’apprête à prendre son petit-déjeuner, son corps refuse de répondre à ses ordres… 48 heures plus tard, elle se retrouve complètement paralysée. Mais elle est loin d’avoir dit son dernier mot!

“C’était un dimanche matin d’avril 2013. Mon fils de 15 ans logeait chez ses grands-parents et mon époux était parti chercher des pistolets à la boulangerie. Je m’étais levée avec une très forte douleur aux épaules. En descendant les escaliers, mes jambes se sont dérobées sous moi. Je me suis dit que ça allait passer, que je n’étais pas bien réveillée. En déjeunant, quand je n’ai plus pu avaler mes bouchées de pistolet, j’ai commencé à m’inquiéter. Quand mon mari a vu qu’après ma douche, je n’arrivais plus à fermer le bouton de mon jeans ni à appuyer sur le pulvérisateur de mon déo, il a compris qu’il fallait filer aux urgences.

Pas si grave…

Je ne m’attendais pas du tout à la suite… et les médecins non plus. Je suis arrivée aux urgences bien maquillée, avec un petit gilet blanc. De l’extérieur, rien n’indiquait la gravité de mon état. Après une longue attente et quelques simples tests (fermer les yeux puis toucher le bout du nez avec l’index), je ne suis plus parvenue à soulever les bras pour atteindre mon nez. L’IRM a révélé que je n’avais pas de tumeur au cerveau, j’étais donc soulagée: ce n’était pas si grave…

J’ai réalisé que ma vie était en danger la première nuit à l’hôpital. Soudain, je n’ai plus pu respirer et j’ai dû être intubée. C’était comme si deux pouces appuyaient sur ma gorge, je me sentais partir… Je me souviens avoir pensé: ‘Laissez-moi vivre encore un peu, le temps que j’apprenne à mes deux hommes à faire une lessive.’

Un diagnostic rapide

Il est assez rapidement apparu que je souffrais d’une maladie rare: le syndrome de Guillain-Barré, qui se caractérise par une attaque des nerfs par le système immunitaire s’accompagnant de fourmillements, d’une faiblesse musculaire, voire d’une paralysie… Dans les premières semaines, il est capital que le cœur (qui est aussi un muscle) continue de battre! Les médecins voulaient me plonger dans un coma artificiel, mais j’ai refusé. Je voulais que mon fils puisse me regarder dans les yeux et y trouver des réponses à ses questions. Entre-temps, mon corps était devenu comme du plâtre. Les infirmières devaient me nourrir, me retourner. Je n’étais plus moi.

Communiquer autrement

Enfermée dans mon propre corps, j’ai commencé à me raconter des histoires pour m’occuper. Je mariais une infirmière célibataire à un médecin, je les imaginais à Tenerife, un cocktail à la main… C’était de la pure fiction. Cela m’aidait à ne pas céder à la panique. J’étais 100% dépendante des autres physiquement, mais mentalement, j’étais 100% autonome. Je suis très reconnaissante envers mon grand-père qui a survécu au camp de concentration de Buchenwald et qui jadis nous racontait comment il s’en échappait mentalement (en allant boire une petite bière avec des amis, en se promenant dans son village d’enfance…), pour survivre à l’horreur. En fait, il m’a donné une arme pour apprendre à gérer l’atrocité. Je veux d’ailleurs absolument transmettre cette faculté à mon fils.

Lorsque ce dernier est venu me voir pour la première fois, je me souviens parfaitement de son petit mouvement de recul, d’incrédulité. Dès la fois suivante, il est revenu à mon chevet avec un tableau qui comportait l’alphabet. Pour communiquer, il le parcourait du bout de l’index et je clignais des yeux quand il était sur la bonne lettre. Ainsi, nous formions des mots. Par exemple, je lui épelais ‘école’ pour savoir comment s’était passée sa journée ou ‘terrasse’ quand je lui conseillais d’aller profiter du beau temps dehors. Quant à mon mari, heureusement, il me connaît par cœur! Il avait briefé deux infirmières pour qu’elles me colorent les cheveux, même aux soins intensifs. C’était important pour moi.

Quel avenir?

Les médecins n’étaient pas très optimistes quant à mon rétablissement. Ils craignaient que ce soit devenu chronique. Tous les signes semblaient en attester: une lente récupération, une phase ‘plateau’ sans amélioration notable, voire une légère aggravation. Tout cela n’était pas de bon augure. Au début, j’ai essayé de contrôler mon angoisse, mais au bout d’un moment sans progrès, j’ai commencé à envisager l’euthanasie. Sans cesse, je me demandais combien de temps j’allais encore tenir comme ça, si je pouvais encore être une mère ou une compagne ou si j’étais juste devenue un poids…

Heureusement, peu après, j’ai récupéré le contrôle de la respiration et, tout à coup, de la parole! Alors  qu’on m’extubait et que mon fils me demandait si ça ne faisait pas trop mal, je me suis entendue répondre: ‘Ce n’est pas grave, ça va, tu sais’. Tout le monde était soufflé. Aujourd’hui, tout est relativement revenu à la normale, excepté ma voix, bien moins forte qu’avant… Ce qui ravit mon fi ls car je ne peux plus l’enguirlander (rires).

Petit à petit…

Après l’hôpital, je suis allée 7 mois en centre de revalidation. Puis, de ma propre initiative, je me suis dit qu’il fallait rentrer à la maison. C’était difficile car j’étais très peu autonome, mais je me suis fixé de petits buts: ‘Dans 6 mois, tu devras ouvrir la portière de la voiture seule ; dans un an, tu reprendras le volant…’ À présent, il reste mes doigts que je n’arrive plus à plier correctement. C’est frustrant car cela me gêne 101 fois par jour pour de petites tâches, mais quand je vois le chemin parcouru, je réussis à relativiser.

Quant à mon fils, je me suis sentie coupable d’avoir ‘disparu’ de sa vie aussi soudainement… surtout à 15 ans, quand un enfant a tant besoin de ses parents. Il est toujours resté attentif: il me peignait les cheveux quand j’en étais incapable, par exemple. Même quand j’étais alitée à l’hôpital, il continuait à me demander l’autorisation pour sortir. Dès que j’ai été mieux, nous nous sommes vite retrouvés! Il a grandi plus vite, je pense. Sans lui, je ne m’en serais peut-être pas sortie aussi bien. Il a été mon objectif, ma raison de me reconstruire.

Une jolie leçon

À présent, encore bien moins qu’avant, je ne perds pas de temps ni d’énergie à des futilités. L’essence de l’existence est très simple pour moi: je souhaite être avec ceux que j’aime et qui m’aiment. En revalidation, quand une personne était jalouse d’une autre, ce n’était pas au sujet d’une belle voiture ou d’un bijou, non, c’était au sujet du nombre de visites… Quand j’étais en chaise roulante, je me souviens de m’être plainte lors d’un concert, jusqu’à ce que je prenne conscience que j’étais incroyablement chanceuse d’être là! J’ai gravé cet instant dans ma mémoire et à présent, j’avance et je profite de la vie au maximum…

Texte: Lore Callens/Adaptation: Régine Segers

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