Histoire de vie: “Je suis enceinte à 52 ans”

Être enceinte à plus de 50 ans, ça fait quoi? © Unsplash

Cadre supérieure dans une banque et maman de 2 enfants de 23 et 25 ans, Raphaëlle vit le grand amour avec Marvin, son nouveau compagnon. L’histoire pourrait sembler banale, si Raphaëlle n’était pas enceinte de 6 mois… à 52 ans.

“Tu ne vas pas sortir habillée comme ça!”, ce sont les mots de Fleurine, 23 ans, mal à l’aise devant sa mère qui s’apprête à nous rejoindre pour une interview. Raphaëlle porte un pull moulant noir à col roulé qui ne laisse aucun doute sur l’arrondi de son ventre. À 52 ans, elle affiche haut et fort sa grossesse et revendique son choix de vivre pleinement cette expérience inattendue: “À partir du moment où mon compagnon et moi avons décidé de garder le bébé, il n’a plus été question de dissimuler la grossesse. Et si les regards qui se posent sur moi sont à la fois interrogateurs, voire sidérés, je m’en moque. Porter la vie n’est ni une maladie ni un handicap”.

Stressés et jaloux

Idyllique, cette troisième grossesse? Pas pour Fleurine et son frère François: “Ils sont terrifiés à l’idée que je meure pendant l’accouchement ou que le bébé soit malformé, ait des problèmes mentaux ou de santé”, explique cette DRH dans une grande institution bancaire. Elle les comprend et a tenté de les rassurer: “Je leur fais un topo détaillé après chaque visite chez le gynécologue, mais rien n’y fait, ils ne croient pas au projet. Et plus fondamentalement, je pense qu’ils ne veulent pas de ce petit frère. Ils me reprochent d’avoir refait ma vie après le divorce et de ne pas me consacrer pleinement à eux. Ils auraient préféré que je reste célibataire, mère poule et un jour, mamy gâteau. Avec ma grossesse, le stéréotype de la quinquagénaire esseulée éclate en mille morceaux. Mon nouveau bonheur les déstabilise et le fait que je pense encore à construire à mon âge les interpelle”.

La fin d’une carrière?

L’employeur de Raphaëlle se montre très dubitatif quant à son évolution professionnelle post-accouchement, et ses collègues désapprouvent son choix: “Certains se sont dits choqués, beaucoup m’évitent de peur d’affronter le sujet”. Et de préciser: “La plupart sont dans l’incompréhension. Quelques-uns ne se sont pas privés de me dire que c’était plutôt au tour de ma fille d’être enceinte, que j’étais égoïste, que je ne pensais pas à l’avenir de ce bébé, que j’allais faire exploser ma famille et rater ma fin de carrière”.

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Une grossesse naturelle

C’est à ce moment de l’interview que le portable de Raphaëlle vibre. “Mon amoureux”, s’excuse-t-elle comme une ado prise en flagrant délit de recevoir un texto enflammé. “Il me dit qu’il s’occupe des courses pour tout le week-end, il est vraiment aux petits soins”. Car pour Marvin, cette grossesse naturelle et inattendue est un véritable cadeau de la vie. Père d’une grande fille de 29 ans, cet ingénieur de 56 ans a été le premier à ne pas vouloir entendre parler d’IVG. “Mon gynécologue m’a conseillé d’avorter et Marvin s’est effondré. Mon généraliste n’a pas été plus positif: pour lui, il valait mieux mettre un terme à cette grossesse contre-nature pour éviter tout risque inutile. Nous avons été vraiment secoués par ce manque de soutien de la part du corps médical. Pour eux, l’avortement allait de soi”.

S’isoler pour trancher

“On s’est alors donné deux semaines de réflexion, isolés de tout et de tous, sans téléphone ni Internet. Nous voulions pouvoir nous centrer sur nous, notre couple, notre avenir, celui du futur enfant et envisager tous les cas de figure, même les plus alarmants. Ce projet ne concerne que nous et les conséquences sur la vie des autres, finalement, ne sont qu’indirectes. Je sais qu’il s’agit d’une grossesse à haut risque, je suis sous haute surveillance médicale, c’est donc en connaissance de cause que nous avons fait notre choix: je sais que le danger est réel, mais le jeu en vaut vraiment la chandelle, il ne s’agit en aucun cas d’un caprice”.

Que Marvin devienne père à 56 ans ne choque personne!

Mère à 52 ans: un stéréotype de genre

Parmi l’entourage du couple, ce sont leurs parents dont ils appréhendaient le plus les réactions: “Nos parents ont entre 79 et 83 ans. À l’annonce de ma grossesse, ma mère s’est décomposée et a éclaté en sanglots. Les parents de Marvin ont quitté la table en m’accusant d’être irresponsable, son père a ajouté que mon choix de vie était purement indécent. Que Marvin devienne père à 56 ans ne choque personne, c’est mon âge qui pose problème et c’est moi qui m’attire toutes les foudres. Aux yeux de tous, je suis une égoïste qui s’offre une cure de jeunesse, une lubie, sans penser une seule seconde aux conséquences. Quand Marvin a annoncé à ses collègues qu’il allait devenir père, tout le monde l’a félicité! Quand il a précisé mon âge, les commentaires, les jugements, voire le mépris ne lui ont pas été épargnés, mais uniquement me concernant. On est complètement dans les stéréotypes genrés et sexistes”.

“Quitte à ce que notre projet choque, nous n’en démordons pas”, insiste Raphaëlle. Ce bébé est le fruit de l’amour, même s’il est le résultat d’un accident de pilule. “Sans ça, jamais nous n’aurions évoqué la possibilité d’un enfant. J’ai mis mon absence de règles sur le compte de la ménopause, à aucun moment je n’ai pensé qu’il s’agissait d’une grossesse! Je suis convaincue qu’un jour, avoir un bébé après 50 ans sera terriblement banal”.

Les grossesses tardives sont-elles plus risquées?

Si elles sont souvent le fruit d’une fécondation in vitro, certaines grossesses rarissimes sont naturelles, comme dans le cas de Raphaëlle. Or, selon les spécialistes, les risques sont grands, tant pour la maman (AVC, hypertension, diabète, hémorragie lors de la délivrance, décès), que pour le bébé (naissance prématurée, malformation, trisomie 21, décès).

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